GREVE DU 9 OCTOBRE 2018

, par udfo82

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ORAISONS

 DDT

Il y avait 2 grandes administrations techniques de l’État : celle de l’agriculture et celle de l’Équipement. Les élus, les particuliers et les autres administrations trouvaient auprès d’elles les réponses à toutes leurs questions techniques. Les services de l’Agriculture et ceux de l’Équipement assumaient des missions d’expertise, de conseil et de contrôle avec un niveau de compétence sans faille. Puis, les politiques ont dit qu’il n’était pas normal que des administrations de l’État fassent ce que des entreprises privées savent faire : Adieu la maîtrise d’œuvre. Puis, les politiques ont dit qu’il n’était pas normal que des administrations de l’État apportent leur aide technique et administrative aux collectivités : Adieu l’assistance à la maîtrise d’ouvrage, adieu l’ingénierie d’, adieu l’ingénierie d’appui territorial. Puis, les politiques ont dit qu’on pouvait très bien déléguer aux collectivités locales certaines missions tout en en contrôlant la gestion et l’exécution : Adieu le logement, adieu l’aide à la pierre.

Et ainsi de suite, d’année en année, à petit feu, les politiques ont fait mourir ces deux administrations maigrement réunies aujourd’hui sous le nom de DDT.

Une DDT qui n’est plus que l’ombre, le zombi, de ce qui fut un fleuron national.

DDT ! On nous dit maintenant que tes missions consistent essentiellement en du conseil et du contrôle. Mais plus personne n’a besoin de tes soi-disant conseil et plus personne ne craint des contrôles que la faiblesse de tes d’effectifs ne te permettent pas d’effectuer.

Une branche morte ne saurait servir de support au reste de l’arbre !

Adieu DDA, adieu DDE, adieu DDT. La branche morte n’en finit pas de s’effriter en débris desséchés. Il ne restera bientôt de toi que le vague souvenir d’une gloire passée que les regrets tardifs ne ranimeront pas.

- Préfecture

Le service public, c’est le patrimoine de ceux qui n’en ont pas.

Le service public est universel et repose sur des droits reconnus à tout citoyen. Il se doit d’être accessible à un prix abordable par tous, allant jusqu’à la gratuité pour certains d’entre eux. En ce sens, le service public contribue à la cohésion sociale et territoriale, à l’égalisation des conditions d’existence de tous.

Au nom d’une vision solidaire de la citoyenneté, il faut, avant tout autre argument, défendre les missions d’intérêt général des services publics. Ne pas recevoir le courrier ou ne pas pouvoir en envoyer dans des conditions acceptables, ne pas recevoir l’eau potable, ne pas pouvoir se raccorder à un réseau téléphonique, ne pas recevoir l’électricité, ne pas pouvoir se chauffer, ne pas avoir de « transports en commun » locaux ou nationaux accessibles à un prix abordable, sont des indices d’une citoyenneté de seconde zone, dans une société divisée entre ceux qui sont connectés aux réseaux de la vie quotidienne et ceux qui ne le sont pas. L’introduction de la privatisation et de la concurrence dans les services publics a conduit à la dégradation des missions d’intérêt général et à l’instauration de « services à deux vitesses ». Pendant que les usagers aisés se tournent vers des services privés lucratifs et plus coûteux, ce qui reste de service public se dégrade et tend à passer du statut de service vraiment universel à celui de service minimal des pauvres.

Dans le domaine des réseaux de transport, on observe que toute « dérégulation » s’accompagne d’un démantèlement dont les effets sont le plus souvent contre-productifs. Il faut en effet « produire de la concurrence » ex nihilo et pour cela découper le monopole historique en de multiples filiales se vendant des prestations en faisant fonctionner la concurrence au détriment de la coopération et de la complémentarité. Ainsi, en Grande-Bretagne, la privatisation de British Railways, à partir de 1994, s’est accompagné de la création d une centaine d’entreprises privées issues de l’entreprise publique démantelée, dont 25 compagnies franchisées pour le trafic voyageur, ou des compagnies louant des trains, louant ou sous-louant des gares ou des parties de gares, etc. Ces entreprises étaient en concurrence, ce qui, selon les promoteurs de la dérégulation, devait conduire à une baisse des prix et à une amélioration de la qualité. Pas de chance pour ces idéologues : les trains britanniques sont devenus les plus chers d’Europe (cinq fois plus que la moyenne européenne selon le Times !), pour une qualité très médiocre.

L’accomplissement des missions d’intérêt général n’est pas qu’un problème de régulation ou de « coûts ». Il repose sur des valeurs que l’introduction de la concurrence met à mal. Les agents de La Poste considèrent par exemple, dans leur majorité, qu’il peut être légitime de consacrer autant ou plus de temps à des « usagers » en difficulté, aux marges de l’exclusion sociale, qu’aux « clients » rentables. Dans un contexte dérégulé, ces comportements pourtant dotés d’une grande utilité sociale, tendent à disparaître ou à devenir marginaux.

A travers ces deux exemples, tout est dit. On est progressivement passé d’un service « public » à un service « au public » puis à un service quasiment marchand dont les entreprises, comme les salariés, tendent à être évaluées sur leurs performances commerciales.

Adieu service public. Tu fais encore un peu partie du bien commun. Mais chaque jour qui passe s’écrit comme la chronique d’une mort annoncée.